La police genevoise exhibe ses trophées de chasse
Paru le : 6 juin 2003 http://www.lecourrier.ch/Selection/sel2003_475.htm

APRÈS G8 · Après cinq jours d'enquête, la police livre un premier bilan de ses actions durant les jours de manifs et les nuits de saccage en ville de Genève.

MICHEL SCHWERI

La dernière conférence de presse de la police sur les événements de la semaine à Genève a donné dans la performance multimédia. Un gendarme est en effet apparu tout de noir cagoulé et blousonné et, en quelques secondes, a retiré son équipement pour se transformer en un « manifestant pacifique », selon un commentaire du chef ad intérim de la police, Christian Cudré-Mauroux. La scène faisait suite à la projection d'une vidéo tournée durant la grande manifestation de dimanche, montrant un vrai militant du bloc noir se changeant in situ après des actes de vandalisme.

En complément à cette démonstration live, les chefs de la police genevoise ont livré un premier bilan des enquêtes sur les divers épisodes de manifestations et de saccages de la ville. Selon le grand patron, l'action des gendarmes a été « continue et concertée », malgré les « difficiles conditions de travail », afin de remplir leurs missions. Celles-ci ne se réduisaient en effet pas à courir après des délinquants, mais aussi à assurer la sécurité des délégations étrangères se rendant à Evian, des organisations internationales et de la grande manifestation transfrontalière.

M. Cudré-Mauroux s'est dit surtout satisfait d'être sorti de la « spirale de la violence » sans mort, ni « blessé grave ». Pour lui, en effet, le photographe anglais touché par une grenade assourdissante et qui doit subir ce matin une deuxième opération à l'hôpital ne s'est pas « annoncé ». Il ne figure pas dans les statistiques, reconnaît le chef de la police.

CASSEURS CHARGÉS

Concernant les interventions de terrain, ce dernier « regrette » le « raid » de 30 minutes mené par des casseurs très organisés le samedi soir. A contrario, il remarque que durant le blocage de quelque 500 manifestants - « parmi lesquels des casseurs se dissimulaient », affirme-t-il - sur le pont du Mont-Blanc, lundi soir, « il n'y a pas eu de saccages en ville ». Enfin, sa première analyse lui fait penser que le Black bloc « local » n'a pas la « masse critique » pour occasionner, seul, autant de dégâts.

Le bilan intermédiaire se décline également en chiffres. Si 19 manifestants blessés se sont annoncés, d'autres, comme le photographe, ne sont peut-être pas répertoriés, a relevé la police. En revanche, les statistiques internes sont précises: 15 agents ont été blessés, dont au moins un tout seul. Environ 500 vérifications d'identités ont eu lieu. Sur ce nombre, 153 personnes ont été emmenées à l'Hôtel de police. Les officiers ont délivré 40 mandats d'amener dont 39 contre des auteurs présumés de vols, d'émeute, de dommages à la propriété ou de violence contre les autorités. Le quarantième ne serait autre qu'un manifestant ayant gravement blessé un inspecteur de police durant une émeute en mai 1998.

Sur le plan matériel, 110 dommages - bris de vitrine et de voiture, incendies... - ont été annoncés à la police, ce qui peut ne constituer qu'une petite partie du bilan final. Les gens ont en effet trois mois pour porter plainte et certains attendent de pouvoir chiffrer leurs pertes. Enfin, la police a exhibé la collection d'objets saisis sur des manifestants, trouvés sur les lieux des conflits ou encore dans le Rhône, sous le pont du Mont-Blanc. Hache, bouteilles incendiaires, battes de base-ball, chaînes, outils divers, couteaux, cutters, fronde, pistolet factice, machette et autres poings américains, mais aussi des objets plus anodins comme des sprays de peinture, des feutres, des foulards ou des tracts couvraient bien 10 m2 de tables et représentait un volume « encore jamais saisi auparavant ».

Dès le 10 juin, huit inspecteurs seront détachés pour régler les suites de ces débordements. On pourra y porter plainte au %022 427 84 59.


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