Drame d'Aubonne: mésentente policière (03/06/2003)
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Le policier alémanique qui a coupé la corde sur le pont de l'autoroute ne comprend pas le français.

ALAIN WALTHER

Ils avaient tout prévu: des grimpeurs expérimentés, un médecin, un infirmier et même des interprètes francophones. Les militants anti-G8 qui ont tenté d'arrêter dimanche matin les véhicules des délégations du G8 d'arriver à Lausanne, ne tirent pas à la même corde que la police cantonale (voir nos éditions du 2juin). Ils l'ont fait savoir.

Le militant altermondialiste, Martin Shaw, est toujours aux soins intensifs au CHUV à Lausanne. Il a été opéré de deux fractures aux vertèbres lombaires, une du bassin et d'une fracture multifragmentaire au talon gauche. Les jours de ce Britanique de 39ans, professeur en relations internationales de l'Université du Sussex, ne sont plus en danger. Martin Shaw a été entendu en fin d'après-midi par la justice. Il pourrait être rapatrié aujourd'hui mardi en Grande-Bretagne. L'homme était le premier de la cordée qui barrait la voie aux voitures du dimanche. Il a fait fait une grave chute de vingt mètres après qu'un policier a coupé la corde. A l'autre bout de la corde, une deuxième personne. C'est Christine, qui se présente comme une militante allemande. Elle ne dira pas son nom et a donné hier en compagnie de camarades présentes sur le pont une conférence de presse.

Policier schaffhousois

"L'opération était dangereuse, spectaculaire mais contrôlée. La police n'avait pas le droit de mettre des vies en danger. La police ignore les droits démocratiques, son incapacité est criminelle," déclare la rescapée. Christine a été sauvée grâce à un double tour de la corde sur la barrière et l'aide de ses camarades et de deux policiers qui l'ont arrêtée dans sa chute. Flashback.

En compagnie de quinze autre militants (Irlande, Etats-Unis, France, Angleterre...), Martin et Christine s'encordent et descendent dans le vide de chaque côté du pont. En avant, un sit-in de militants prévient les automobilistes. Il y aurait eu une banderole annonçant que "si la corde est coupée, deux personnes seront tuées".

Les manifestants garantissent qu'ils ont pris toutes les précautions pour expliquer leurs actions (banderoles, interprètes francophones). Le policier qui a coupé la corde est un Confédéré, un Schaffhousois comprenant peu le français. "Ce drame est lié à une mésentente reposant sur un problème linguistique", analyse le juge d'instruction Jean-Marie Ruede, chargé de l'enquête.

Les militants estiment que le policier a délibérément coupé la corde. Selon la justice vaudoise, c'est en effet volontairement que la corde a été coupée. "Pressé par les automobilistes qui voulaient avancer, le policier confédéré a commencé par lever la corde puis l'a tranchée. Mais savait-il qu'il y avait deux personnes qui se balançaient au bout? Interrogé dans sa langue maternelle, l'homme affirme avoir entendu l'ordre de trancher. "Coupez!", au lieu de: "Ne coupez pas!" Le juge est toujours à la recherche du policier francophone qui aurait dit quelque chose à son collègue alémanique. Pour sa part, le juge d'instruction cantonal, Jacques Antenen, estime que le policier a agi de sa propre initiative: "L'ordre de couper la corde est inimaginable!" juge le magistrat.

"Vidéo svp!"

"Je lance un appel pour que l'on me donne une copie de la vidéo prise par les manifestants", demande Jean-Marie Ruede. Il a entendu pour l'instant sept militants et quatre policiers. Le policier confédéré n'a pas été inculpé. Les anti-G8, eux, risquent d'être inculpés d'entrave à la circulation publique. Sur le site internet des alternatifs qui se veut indépendant (indymedia), on trouve une sélection de photos vraisemblablement tirées du document vidéo en question. L'enquête continue.


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