La police investit l'Usine à la recherche du Black blok
Paru le : 2 juin 2003 http://www.lecourrier.ch/Selection/sel2003_447.htm

APRÈS-MANIF · La clôture de la manifestation prononcée, le centre-ville de Genève s'est transformé en terrain de chasse. Dont la partie s'est terminée à l'Usine.

VIRGINIE POYETTON

Après la mobilisation anti-G8 de la journée, Genève s'est distinguée hier soir dans la chasse aux casseurs. Première grande cible de l'opération: l'Usine.

Aux alentours de 21h, des policiers en civil ont investi les lieux. Après s'être enfermés à l'intérieur, ils ont enfoncé les portes des étages sans abîmer le matériel. Une cinquantaine de personnes ont été arrêtées, la grande majorité relaxée. A l'heure où nous mettions sous presse, des interpellations étaient en cours et quelque 300 personnes continuaient de manifester. Au dire de la police, la descente se justifiait par la présence d'une centaine de membres du Black bloc dans le centre alternatif genevois. Toute l'après-midi, police et casseurs se sont affrontés à coups de pierres, de balles en caoutchouc et de gaz lacrymogènes.

FORCE CONTRE ABSURDITÉ

Une fois la manifestation officiellement close, aux alentours de 14 h 30, la police, postée devant le Museum d'histoire naturelle tente d'arrêter des manifestants reconnus comme responsables des casses de la veille. La tension monte, les manifestants s'agglutinent autour du cordon policier. Déjà, certains éléments se détachent du groupe et envoient toutes sortes de projectiles sur les forces de l'ordre. La gendarmerie genevoise pousse alors les quelque 500 manifestants jusqu'à Rive.

« Nous avions décidé de faire une manifestation pacifique. Pour notre part, nous estimons avoir gagné notre pari. Les blocages se sont bien passés, ainsi que la manifestation. Après, si certains ont décidé d'agir autrement, on n'y peut pas grand-chose », s'indigne Rémy Pagani, membre du Forum social lémanique (FSL). Devant les manifestants, le syndicaliste prend la parole pour conseiller aux gens de rentrer chez eux. Rien n'y fait: pendant près d'une heure, la foule continue de croître. A partir de ce moment, le service d'ordre du FSL se fait rare, se sentant impuissant face à l'absurdité des casseurs et le manque de transparence des manoeuvres policières.

DÉNONCIATION GÉNÉRALE

De 17 h à 19 h, les événements se déclinent en partie de « chasse » entre les rues basses et leurs ruelles perpendiculaires. La plupart des vitrines non barricadées sont brisées par une faible minorité de casseurs - entre trente et cinquante jeunes cagoulés. Ils attaquent la police à coups de jets de bouts de verre et de pierres. Cette dernière avance, recule, riposte à l'aide de balles en caoutchouc et de gaz lacrymogènes.

A nouveau, la tension monte d'un cran. La police se retire. Quelques jeunes s'en prennent à la vitrine d'un magasin de jouet dans les rues basses. Très vite, les casseurs sont hués par la foule des manifestants. Une chaîne humaine s'organise pour les arrêter, des observateurs parlementaires se postent devant les vitrines pour éviter les pillages. Puis la police refait son apparition à la place du Molard et repousse, au pas de charge, la foule jusqu'au pont des Bergues. Un des casseurs de la vitrine sera arrêté un peu plus tard.

DISPERSION

« Votre manifestation n'est pas autorisée. Dispersez-vous! Ceci est un ultimatum. » Il est 18h35. Dix minutes auparavant, de jeunes cagoulés s'étaient acharnés sur la vitrine de la boutique Lacoste à la Rue du Rhône. Une demi-heure s'écoule avant que la police ne reformule son ultimatum. A 19h05, une cinquantaine de policiers donnent la charge sur les manifestants, avant de les repousser du côté du pont des Bergues.

Dans un tel mouvement d'allers et venues, les stratégies policières sont difficilement saisissables. Certains policiers l'expliquent par l'interdiction qui leur est faite de boucler complètement une rue et l'obligation de laisser une issue de retraite ouverte aux manifestants. « Ca devient alors plus difficile d'arrêter un casseur. » Chez les supérieurs hiérarchiques eux-mêmes, on semble peu au courant des stratégies suivies. « Pour l'instant nous réagissons plus que nous agissons, vu le nombre de casseurs et l'ampleur des dégâts », confie un commandant de la police.


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